« Il faut canaliser les agriculteurs »
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« Pourquoi vous êtes-vous lancé dans l’agriculture de conservation des sols ?
Allez savoir… Je suis passionné par ce que je fais depuis toujours. Mais en 1998, j’étais fatigué par le système de la chimie, fatigué de faire, agriculteur après agriculteur, des ordonnances. Je pensais qu’il y avait autre chose à réaliser. J’ai rencontré des personnages forts, comme Claude Bourguignon. Le fait de l’avoir entendu une fois m’a fait prendre conscience des choses, qu’il fallait changer nos pratiques. En 1999-2000, il y a eu un effondrement terrible du cours du blé. Et là, il est devenu nécessaire de trouver d’autres systèmes, pour faire baisser les coûts de production, comme l’ACS. Ça marche toujours bien les premières années, mais on n’avait pas la science des couverts. Vers 2006-2008, on a eu un coup de mou et on a ressorti les charrues. Mais les rencontres avec d’autres microbiologistes, qui nous ont parlé de production d’azote avec les couverts, nous ont permis de construire des itinéraires techniques qui tiennent la route.
Aujourd’hui, comment jugez-vous l’évolution de l’ACS ?
Avant, il y avait beaucoup de freins, il y en a beaucoup moins aujourd’hui. Le glyphosate est devenu le questionnement principal des agriculteurs qui veulent se lancer. « Si j’investis dans un semoir de semis direct et qu’on nous enlève le glyphosate dans deux ans, pourquoi je me lancerais ? » Mais je constate aussi que de plus en plus de jeunes ne voient pas d’autre voie que l’agriculture de conservation des sols. Prenez mon stagiaire Étienne, il n’envisage pas de faire autrement. Ma génération a été formatée, entre travail du sol et chimie…
Pourquoi avoir rejoint Vivescia ?
Vivescia est vraiment investie dans l’ACS. Avec le club Agrosol, elle a aujourd’hui quinze années d’antériorité sur le sujet. Les essais menés, notamment sur les couverts et les associations variétales, ne sont faits nulle part ailleurs. Le couvert c’est tout aussi important qu’une culture. Avec les moyens de la coop, ça m’a permis d’aller beaucoup plus vite et beaucoup plus loin dans mon travail. Quand j’étais à la chambre d’agriculture, personne ne croyait vraiment en l’agriculture de conservation des sols.
Le club Agrosol regroupe des agriculteurs novices en ACS, comme d’autres expérimentés. Comment appréhendez-vous cela lors de vos tours de plaine ?
Je fais toujours attention à n’oublier personne. En général, il s’écoule trois ans entre l’entrée de l’agriculteur dans le groupe et le réel virage de son exploitation en ACS. Il faut toujours passer du temps à rassurer ceux qui débutent, mais les autres viennent quand même. Il est clair qu’un agriculteur qui est dans le groupe depuis cinq ans n’a pas les mêmes attentes que celui qui n’y est que depuis trois ans ou moins. Une journée comme celle d’aujourd’hui, juste avant la moisson, répond aux attentes de tout le monde. Mais dès qu’on arrive à l’automne, il faut adapter les itinéraires techniques selon le degré d’avancement en ACS de chacun.
Quel conseil donnez-vous aux agriculteurs qui se lancent en ACS ?
On a construit des modèles qui marchent, mais on travaille avec de l’humain qui veut toujours aller plus loin. Les tours de plaine sont un moyen de canaliser les agriculteurs, tout comme les tableaux de bord que je leur transmets. Les modèles sont plus fonctionnels, plus performants si on respecte les règles. Personnellement, j’ai mis 22 ans à construire ces règles, ce ne sont pas forcément les meilleures mais elles apportent un peu de sécurité. »
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